Oui mais c'est long d'attendre.
J'ai l'impression d'attendre tout le temps...
Il faut que je me lâche...
D'abord, il y a l'attente, aux urgences, le 2 juillet dernier. Je rentre dans ma 10ème semaine de grossesse. C'est un rêve. Je ne suis jamais malade, de temps en temps fatiguée, de
temps en temps barbouillée, mais c'est tellement bien de se dire qu'une toute petite vie s'anime dans mon ventre.
Alors j'attends, assise, à me calmer. Après tout, des saignements, pendant la grossesse, ça arrive. Un coup de chaud, ou de fatigue certainement.
Voilà l'interne de service.
Rien d'anormal, bébé est toujours là, il a doublé depuis le 15 juin, il fait maintenant 28,6 mm. D'après elle, je ne fais pas de décollement du placenta ni de fausse couche,
"tout va bien !".
Alors j'attends que ça s'arrête.
Le lendemain, toujours ces saignements mais "tout va bien" donc pas d'inquiétudes.
Samedi 4 juillet, de retour aux urgences en fin d'après midi. Je me sens bizarre. Ce ne sont pas vraiment des douleurs, mais je sens que ça s'anime là-dedans. Comme une bulle qui gonfle et
se dégonfle.
Plus d'activité cardiaque. Ma petite fourmi s'est essoufflée. Je jette un bref coup d'oeil à l'écran et je la vois. Elle est formée, je distingue les bras, les jambes... et je tourne la
tête.
A quoi ça sert...
On me donne le choix pour l'expulsion : soit la méthode naturelle, soit médicaments, soit curetage.
Je choisi la méthode naturelle, et 1h après, le travail commence. Je "perds les eaux" ou en tout cas, le peu qu'il y a.
C'est un cauchemard. Il y a tout ce sang ; toutes ces choses...
Et puis voilà qu'au bout de quelques heures de travail, apparaît cette chose, minuscule mais reconnaissable, c'est elle, ma si petite créature. Je la regarde, très peu, de toute façon, avec
toutes ces larmes...
Je m'installe dans le salon, sachant très bien que la nuit va être longue et je somnole entre 2 "évacuations".
Lundi 6 juillet, je retourne aux urgences pour une échographie de controle et là, ô joie, il ne reste plus rien. Ca y est, c'est fini. Je suis vide.
Le sentiment est partagé... je suis soulagée et malheureuse.
J'ai du mal à discerner ce qui est le plus douloureux. Mon corps, ou ma tête...
Et cette culpabilité qui ne me lâche pas. J'ai beau me persuader et persuader les autres que rien n'est de ma faute, je n'arrive pas à l'admettre.
Et c'est si bizarre de se sentir vide.
Et c'est si douloureux d'entendre autour de soi "vous êtes jeunes", "HEUREUSEMENT tu n'étais enceinte QUE de 2 mois et demi", "Vous allez pouvoir profiter de votre vie de couple", "c'est pas
grave"...
Et c'est si difficile parfois, d'avoir la tête haute.
Et c'est si compliqué de faire son "deuil".
Et ça va être si long d'attendre que ça passe...
Merci à mon amour qui m'aide et qui m'a soutenu, même si aujourd'hui ses objectifs sont différents.
Merci aux personnes qui savent ce que c'est, ou en tout cas, qui prennent le temps d'imaginer la douleur qu'on a de perdre un petit ange, si minuscule qu'il soit, auquel on a eu le
temps de s'attacher...
Il va falloir que je laisse mon esprit admettre d'entreprendre quelque chose de nouveau et pas simplement refaire ce qui a raté...